27/11/2014

SŒUR ANNE, NE VOIS-TU DONC RIEN VENIR ?

Lorsque je suis entré dans l’Assurance (c’est un peu comme en religion, on y reste toute sa vie !),
dinosaure.jpg la profession était un peu déstabilisée par la croissance de ces sociétés que l’on appelait souvent alors les mutuelles sauvages. Ce délicat qualificatif désignait les MSI, pour beaucoup niortaises, qui transgressaient les codes établis : distribution intégrée, contrats forfaitaires et informatisés et surtout, prix cassés. Bien que déjà implantées dans le paysage depuis des années, les assureurs traditionnels  - comme l’était ma compagnie – qui n’avaient rien vu venir, continuaient de prophétiser « elles vont se casser la g… ». Les réalités économiques auront raison de leur audace tarifaire, et puis, sans le conseil que peuvent prodiguer nos réseaux, les clients n’y resteront pas longtemps… on connaît la suite !

Deux décennies plus tard, de nouveaux acteurs se sont introduits dans le Landerneau de l’assurance : les banquiers. L’épisode du développement de l’assurance vie n’a guère touché les sociétés en place qui restaient sous-développées en la matière. Au contraire, cela a développé un marché nouveau au bénéfice de tous. L’histoire est toute différente avec le Dommage ! La encore, personne n’avait vu venir ce nouvel acteur qui prendrait bientôt 20 à 30% du marché IARD ; en fait, on avait refusé de voir car dès 1975, les assureurs traditionnels étaient alertés par leurs réseaux d’agents, souvent  aussi administrateurs de caisses locales de Crédit Mutuel, que cette banque commençait à casser la baraque dans l’est. Cela a même été ma première mission d’étude ; sans doute pas suffisamment convaincante car la direction générale de l’époque a vite enfoui le dossier… Parallèlement, certains acteurs en place ont trouvé intéressant d’aider ces nouveaux venus à se développer et ont multiplié les partenariats (gagnant/perdant ?). Aujourd’hui, on entend encore « les clients reviennent au premier sinistre », alors que leurs parts de marché ne cesse de croître…
L’arrivée de l’Internet a provoqué d’immédiates initiatives sur la place ; généralement promises à des flops magistraux. En particulier parce que le modèle classique de l’assurance n’était pas revisité (cf. OK Assurance).
Il est toujours extrêmement dangereux d’ignorer la concurrence potentielle, surtout lorsque l’on est gros !
Il ne suffit pas d’intégrer de nouvelles technologies pour être modernes, de la même façon qu’il est illusoire de se faire passer pour socialement responsable avec quelques communications verdies (greenwashing) !

Aujourd’hui, plusieurs phénomènes apparaissent clairement comme susceptibles de faire naître de nouveaux opérateurs s’appuyant sur un savoir-faire, une technologie, une image de nature à proposer au marché des solutions innovantes et complètement exogènes à l’assurance. Citons parmi ces phénomènes :
- le sentiment de défiance des assurés vis-à-vis de la profession et corollairement sa mauvaise image de marque
- les évolutions des modes de consommation : partage, location, achats groupés,…
- la recherche systématique de prix bas, de bonnes affaires, de comparaison
- la communication entre les clients, notamment via les réseaux sociaux
- le peer-to-peer (fonctionnant déjà en matière de crédit)
- la recherche de solutions échappant à la taxation de l’assurance et aux règles de solvabilité
- l’appétence des marchés pour des solutions servicielles
-…

 

Alors, on peut, comme l’autruche,  se cacher la tête dans le sable (belle image que donnait la pub  AGF il y a quelques années !) ; on peut imaginer que ça ne marchera pas ; on peut envisager de pactiser avec de nouveaux venus qui verront intérêt à « louer » aux compagnies les marges de solvabilités exigées,…
La bonne attitude serait plutôt de se donner la capacité d’imaginer  comment des acteurs inédits (et peut-être encore inexistants ou embryonnaires) pourraient  aborder  de façon  déstructurée les besoins de protection de nos concitoyens.

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